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Le rapport IGAS/IGEN - janvier 2002

et les dispositifs d'aide à l'intégration scolaire

Présentation

Voir le texte du rapport à la page Le rapport IGAS/IGEN

S'il y a des difficultés et des échecs d'apprentissage qui interpellent les enseignants au cœur même de leur pratique pédagogique, - l'enseignement de la lecture et l'éducation du langage, - ce sont bien ceux qui sont en relation avec les troubles neurologiques ou neuropsychologiques du langage. C'est pourquoi la scolarisation des enfants porteurs de ces troubles s'avère souvent désastreuse si l'enseignant reste seul face au problème et si aucune aide ne lui est apportée. La mise en œuvre d'un partenariat réellement opérationnel et efficace , avec des professionnels des pathologies du langage, apparaît le plus souvent indispensable pour une scolarisation réussie.

Un rapport honnête et accablant

De ce point de vue, le rapport d'évaluation des dispositifs médico-sociaux et sanitaires (1) participant à la détection, au dépistage, au diagnostic et à la prise en charge des troubles spécifiques du langage établi par la Commission d'enquête IGAS/IGEN pourrait sembler décourageant (2). Sa conclusion est catégorique : l'ensemble de ces dispositifs sont actuellement en France notoirement insuffisants. Mais l'intérêt de ce rapport sans complaisance est de dresser un tableau de la situation actuelle beaucoup plus précis et exigeant qu'il ne l'a jamais été.

 (1) Le secteur médico-éducatif est le secteur couvert par la loi d'orientation de 75, il comprend notamment les IME (instituts médico-éducatifs), les IR (Instituts de rééducation), les SESSAD, les CAMSP, et également les CDES. Le secteur sanitaire est le secteur hospitalier, il comprend notamment les hôpitaux de jour, les dispensaires de psychiatrie infanto-juvénile et les CMPP.
(2) Mission confiée le 6 juin 2001 à trois inspecteurs généraux de l'Éducation nationale (Mesdames Catherine Bizot et Yveline Ravary, et Monsieur Bernard Gossot) et à deux inspecteurs généraux des Affaires sociales (Madame le Docteur Anne-Chantal Rousseau-Giral et Madame Hélène Strohl). Cette mission constituait la mesure n°11 du plan d'action interninistériel 2001-2003 relatif à la prise en charge de ces troubles. Voir le résumé du rapport dans la partie "documents annexes" du site : "Le rapport IGAS/IGEN".
La mission se proposait de vérifier si les retards et les échecs constatés dans les domaines de la prise en charge rééducative et pédagogique étaient liés aux faiblesses du dispositif de dépistage et de diagnostic et en particulier à des présupposés étiologiques fortement imprégnés par l'approche psychothérapique.

D'emblée, toutefois, la mission reconnaît qu'il ne lui a pas été possible d'établir un réel état des lieux, d'ordre quantitatif, faute de définitions établies et consensuelles des troubles spécifiques du langage et faute de données épidémiologiques fiables. (3)

 (3) Tout travail sur la scolarisation des enfants concernés se heurte également à la complexité des troubles du langage au niveau de leur définition... Ces troubles sont divers et ils s'accompagnent souvent de troubles associés.

1. L'insuffisance des dispositifs existants

Le rapport constate qu'aucun des dispositifs pédagogiques et de soins existants n'a été spécifiquement institué pour prendre en charge les enfants souffrant de troubles complexes du langage.

1) Les structures scolaires spécialisées semblent peu adaptées à l'accueil de ces enfants et adolescents, souvent d'intelligence normale ou supérieure. (voir ci-dessous : 3. Les dispositifs de l'intégration scolaire).

2) Les dispositifs sanitaire et médico-social ne prennent en compte que depuis peu les troubles complexes du langage.

  • La mission constate le faible effectif de spécialistes médicaux et paramédicaux bien formés sur le sujet : déficit notamment en neuropsychologues compétents pour effectuer un bilan neuropsychologique.
  • C'est le secteur libéral, en particulier les orthophonistes, qui prend en charge en ambulatoire la majorité de ces enfants, bien que leur formation sur les troubles complexes du langage (oral notamment) soit encore insuffisante.
  • La médecine scolaire reste organisée selon un modèle de bilans systématiques peu compatible avec des interventions ciblées.
  • L'offre ambulatoire institutionnelle, tout en offrant une palette de structures et un vivier de compétences qui, en principe, les prédisposent à l'accueil des troubles complexes du langage, n'en présentent pas moins actuellement de graves in suffisances :
    • les CAMSP ne disposent pas d'orthophonistes en nombre suffisant et leur compétence s'arrête à 6 ans ;
    • les CMPP, au moins la plupart d'entre eux, et bien qu'ils reçoivent déjà une grande partie des enfants souffrant de troubles dits instrumentaux, n'ont pas la culture neuropsychologique, voire dénient l'existence propre de ces troubles, systématiquement rapportés à une étiologie psychogène ;
    • les CMP, dispensaires du secteur de psychiatrie infanto-juvénile, semblent moins indiqués a priori : ils sont saturés par la prise en charge des troubles psychiatriques, et leurs personnels ne sont pas formés à l'approche neuropsychologique ;
    • les équipes hospitalières, enfin, semblent très faiblement impliquées, en dehors de quelques CHU qui ont ouvert des consultations multidisciplinaires spécialisées.

     

2. Le parcours difficile des enfants

Dans les six départements visités, la mission a observé que les parcours des enfants souffrant de troubles complexes du langage relèvent encore trop souvent du parcours du combattant.

  • La détection est essentiellement le fait des enseignants de maternelle, avec les risques d'une stigmatisation trop rapide ou au contraire d'une minoration des problèmes…
  • Les pratiques de diagnostic sont de qualité disparate.
  • La prise en charge est souvent tardive, erratique et inadaptée. Les professionnels spécialisés, notamment les orthophonistes risquent de négliger l'approche multidisciplinaire des troubles sévères et de leur rééducation.
  • Problème important, souvent sans solution, des enfants souffrant de troubles complexes du langage associés à des troubles du comportement. Ces cas sont loin d'être rares.
  • Les enquêteurs pensent avoir observé une tendance des parents à demander une éducation spécialisée, c'est-à-dire, la création d'établissements ou de classes spécialisées. Ils s'inquiètent du risque de création de filières (4).
 (4) Ce n'est certes pas la tendance qui s'exprime sur les listes de diffusion internet, où la majorité des parents revendiquent le droit à l'accueil dans les classes ordinaires (avec l'aide des AVS !).
De ces observations, la mission a tiré quelques propositions, obéissant à la nécessité de mettre en place une prise en charge précoce sans instituer une nouvelle catégorie spécifique de handicap :

  • La détection des difficultés d'apprentissage du langage, oral puis écrit, paraît relever des enseignants et le dépistage des médecins scolaires et de ceux de PMI.
  • La nécessité d'un diagnostic très complet de la nature et des formes des troubles complexes du langage confirme la nécessité d'une montée en puissance des centres de références. (5)
 (5) Des "centres de référence" seront mis progressivement en place dans les centre hospitaliers pour le diagnostic et les préconisations de prise en charge, ainsi que l'articulation des dispositifs existants. Ces centres contribueront notamment à mieux documenter les dossiers présentés en CDES de façon à faciliter la tâche des équipes. Leur avis devrait être sollicité pour tout renouvellement de séances d'orthophonie, en libéral ou en CMPP, au-delà de six mois.
Une vingtaine de ces centres fonctionnent déjà de façon satisfaisante sans attendre le " label ". On en trouvera la liste dans ce site. Voir : liste des Centres de référence pour le diagnostic des enfants et adolescents souffrant de tyroubles du langage.
  • La prise en charge doit être diversifiée et donner lieu pour chaque enfant à l'établissement d'un projet individuel de prise en charge, avec un professionnel référent, acté par la CDES (6).
 (6) Les solutions de prise en charge pour ces enfants doivent être diversifiées et coordonner, le plus souvent, les interventions des professionnels du secteur libéral, des institutions scolaires, médico-sociales et sanitaires, ambulatoires et des établissements. Le rôle d'orientation des CDES devient donc primordial. Or à l'heure actuelle, trop d'équipes de CDES font du handicap une approche restrictive. Dans le contexte actuel, les CDES sont en difficulté pour appréhender les dossiers de demandes d'AES, d'orientation ou simplement d'aménagement à l'examen, du fait de leur méconnaissance des troubles complexes du langage et de leur difficulté à évaluer le taux d'incapacité qui en découle pour l'enfant.
  • La construction d'un plan départemental de prise en charge des troubles complexes du langage peut être élaboré dans le cadre de Handiscol.
  • La formation des enseignants, des psychologues scolaires, des orthophonistes, des médecins de santé scolaire et de PMI doit être revue et actualisée (7).
 (7) Des préconisations pédagogiques à destination tant des enseignants spécialisés que de ceux des classes ordinaires, mais également des réseaux d'aides aux enfants en difficultés sont détaillées dans le rapport.
 
3. Les dispositifs de l'intégration scolaire

Les dispositifs de prise en charge doivent être diversifiés en fonction de la gravité et de l'ancienneté des troubles.

v Côté école

Rappelons que les modalités de la scolarisation de ces enfants, dès lors que celle-ci exige des aménagements, peuvent être de trois ordres, en fonction de la sévérité des troubles et des aides accessibles :
a) scolarisation dans les classes ordinaires, dans le cadre d'un projet individuel d'intégration
b) scolarisation dans une classe d'intégration scolaire (clis)
c) scolarisation dans les classes d'un établissement spécialisé (8)
 (8) Seuls les enfants souffrant de troubles complexes très sévères ou de troubles associés, ont besoin d'une éducation en établissement ou section d'établissement spécialisé. Nous ne nous arrêterons pas à cette catégorie d'enfants. Les autres ont besoin d'une pédagogie individualisée dans une classe ordinaire ou intégrée d'une rééducation organisée en ambulatoire et d'une rééducation organisée en ambulatoire.

a) Le rapport observe qu'il plusieurs formules d'intégration en milieu ordinaire, basées sur une démarche de projet et autorisant une articulation avec un suivi médical extrascolaire. Force est de constater toutefois que l'adhésion à cette démarche de projet est loin d'être acquise par tous, tant du côté des enseignants que du côté des professionnels de la santé.

b) La scolarisation dans une classe d'intégration scolaire (clis), également basée sur une démarche de projet et articulée avec un suivi médical extrascolaire pourrait s'avérer adéquate dans le cadre d'une problématique d'enfants à besoins éducatifs spécifiques. (9)
 (9) Il n'existe à l'heure actuelle que peu d'accueils possibles en CLIS ou en UPI, pour les enfants souffrant de troubles complexes du langage. Le rapport des Inspecteurs généraux observait en janvier 2002 que cette formule se heurtait à la difficulté d'inscrire ces troubles dans une problématique de prise en charge d'enfants handicapés (c'est-à-dire à besoins éducatifs spécifiques). Cette possibilité a été reconnue depuis par la circulaire du 31 janvier 2002 relative aux troubles du langage et confirmée par la circulaire du 30 avril 2002.
Concernant les dispositifs scolaires, le rapport rejoint les orientations de la circulaire relative aux troubles du comportement, parue peu avant le dépôt du rapport. (Voir : la circulaire du 31/01/ 02).

On sait que la circulaire estimait inutile la création de CLIS ou d'UPI bénéficiant d'un statut particulier pour accueillir les enfants concernés. Le rapport IGAS/IGEN n'est pas favorable non plus à la création de catégories juridiques spécifiques pour les établissements et services (SESSAD ou SSEFIS) prenant en charge les enfants souffrant de troubles complexes du langage (annexe XXIV).

Selon les endroits, ces services pourront intervenir auprès d'un enfant scolarisé dans une classe ordinaire, mais avec un projet individuel, soit auprès d'enfants souffrant de ces troubles et regroupés dans une même classe.


v Côté partenaires

Quelles sont les structures ou les dispositifs d'aide extrascolaire, avec lesquels une intégration scolaire peut être combinée, dans le cadre d'une intégration individuelle dans une classe ordinaire ou d'une intégration collective ? Le rapport des Inspections générales évoque :

1. les SESSAD ou SSEFIS (Service de Soutien à l'Education Familiale et à l'Intégration Scolaire)

Les enfants souffrant de troubles sévères auront besoin d'une scolarisation dans une classe intégrée ou dans une classe ordinaire avec un projet d'intégration et l'appui d'un service de soins à domicile (SESSAD ou SSEFIS) qui leur fournira les prestations de soins et rééducation nécessaire en plus de la pédagogie adaptée (10).
La prise en charge extrainstitutionnelle est alors organisée par les professionnels - et parmi eux, bien entendu, des orthophonostes - et non plus laissée à charge des parents ; la relation avec l'équipe enseignante et l'institution scolaire est systématisée. Ce dispositif paraît particulièrement bien adapté à la prise en charge des enfants souffrant de troubles complexes du langage sévères.
 (10) S'il n'existe aucun texte prévoyant, dans le cadre des annexes XXIV, l'agrément d'établissements médico-éducatifs ou de services de soins à domicile pour enfants souffrant de troubles complexes du langage, certains établissements ont créé ou proposé des SESSAD ou SSEFIS. La plupart les établissements et services pour enfants déficients auditifs sont prêts à reconvertir leurs capacités excédentaires dans la prise en charge de ces enfants.

2. les orthophonistes

Comme on l'a déjà noté, c'est le secteur libéral, en particulier les orthophonistes, qui prend en charge en ambulatoire la majorité de ces enfants.

Le rapport observe que l'une des difficultés auxquelles on se heurte pour un travail efficace tient au fait que la cotation des actes de bilan soit peu intéressante en regard du temps qu'ils impliquent (11). D'autre part, l'offre libérale de rééducation se trouve souvent débordée face à des formes sévères impliquant une prise en charge multidisciplinaire coordonnée et un rythme plurihebdomadaire.
 (11) Il semble en effet que le statut des orthophonistes ne favorise pas leur implication dans un véritable partenariat, à moins d'un certain bénévolat de leur part…
Le rapport ajoute qu'une réforme de la tarification des établissements et services pour enfants handicapés (dotation globale) conjointe à une harmonisation des tarifs laissés à charge des parents selon que l'enfant est rééduqué en libéral, en ambulatoire ou en établissement devrait permettre une neutralité dans la construction des projets individuels de prise en charge.
 
Mise à jour : 20/09/02

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